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Prévoyance

Une proposition de loi pour généraliser la prévoyance collective à tous les salariés à l’horizon 2027

Le 28 mai 2024, plusieurs députés ont déposé une proposition de loi visant à instaurer une prévoyance collective obligatoire pour tous les salariés à partir du 1er avril 2027. Cette couverture serait financée par une cotisation d’au moins 1,50 % dans la limite du plafond de la sécurité sociale, la part patronale étant au minimum de 50 %. À ce stade, la proposition de loi n’est pas encore inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée.

L’origine de la proposition de loi

Selon l’exposé des motifs de la proposition de loi, environ 5,5 millions de salariés, fonctionnaires, travailleurs indépendants ne disposent pas d’une couverture prévoyance complémentaire satisfaisante (14e baromètre de la prévoyance, CTIP/CREDOC, 2021).

Ce défaut de couverture tient notamment au fait que la souscription d’une prévoyance complémentaire collective par les employeurs n’est obligatoire que pour les cadres (prévoyance décès).

À noter : il faut mettre à part le cas de la prévoyance Frais de santé, pour laquelle la loi impose un socle minimal de garanties collectives et obligatoires (c. séc. soc. art. L. 911-7). Dans la proposition de loi, le terme prévoyance est utilisé dans son acception hors frais de santé.

Aussi, face à ce constant, la députée Renaissance Astrid Panosyan-Bouvet a déposé à l’Assemblée nationale le 28 mai 2024 une proposition de loi visant, dans une première étape, à instaurer une prévoyance collective obligatoire pour les seuls salariés.

La protection sociale complémentaire des fonctionnaires fait l’objet d’un traitement spécifique.

Pour les travailleurs indépendants, la députée estime qu’il conviendra d'initier une réflexion globale sur la portabilité des droits à la protection sociale, y compris complémentaire, tout au long de la vie professionnelle.

Cette proposition vise également à contrecarrer une décision de la Cour de cassation du 15 février 2024 sur la portabilité des droits (voir ci-après).

Les garanties visées : incapacité de travail, invalidité, décès

La prévoyance complémentaire recouvre les opérations ayant pour objet la prévention et la couverture notamment du risque maladie-maternité, décès, incapacité de travail, invalidité et décès.

A l’heure actuelle, en l’absence de dispositions conventionnelles, les employeurs ne sont pas tenus de mettre en place des garanties de prévoyance complémentaire, sauf l’assurance décès pour les cadres et la couverture minimale « frais de santé » pour tous les salariés.

La proposition de loi vise à ce que les employeurs soient tenus de mettre en place à terme des garanties incapacité de travail, invalidité, décès au profit de tous les salariés.

Date cible : 1er avril 2027

À partir d’avril 2027, toutes les entreprises seraient tenues de faire bénéficier leurs salariés d’une couverture complémentaire incapacité, invalidité ou décès à caractère collectif et obligatoire conforme à un socle minimal comprenant la prise en charge totale ou partielle des risques décès, incapacité́ et invalidité́.

Le financement devrait reposer au moins pour 50 % sur l’employeur (voir plus loin) (proposition de loi, art. 2).

Dans cette perspective, la proposition de loi prévoit que les organisations syndicales et patronales engageraient avant le 1er janvier 2025 des négociations au niveau des branches afin de permettre aux salariés d’accéder à cette couverture minimale « incapacité́, invalidité́ ou décès » obligatoire avant le 1er avril 2027 (proposition de loi, art. 1, I).

La négociation devrait porter sur au moins 5 thèmes :

-la définition du contenu et du niveau des garanties ainsi que la répartition de la charge des cotisations entre employeur et salariés ;

-les modalités de choix de l’assureur : la négociation examinerait en particulier les conditions, notamment tarifaires, dans lesquelles les entreprises peuvent retenir le ou les organismes assureurs de leur choix, sans méconnaître les objectifs de couverture effective de l’ensemble des salariés des entreprises de la branche ;

-le cas échéant, les modalités selon lesquelles des contributions pourraient être affectées au financement de l’objectif de solidarité́, notamment pour l’action sociale et la constitution de droits non contributifs ;

-le délai, au moins égal à̀ 18 mois à compter de l’entrée en vigueur de la convention ou de l’accord et expirant au plus tard le 1er avril 2027, laissé aux entreprises pour se conformer aux nouvelles obligations conventionnelles ;

-le cas échéant, les adaptations dont doit faire l’objet la couverture des salariés relevant du régime local de prévoyance complémentaire d’Alsace-Moselle, en raison de la couverture garantie par ce régime.

A compter du 1er février 2026 et jusqu’au 1er avril 2027, les entreprises pourvues d’un ou plusieurs délégués syndicaux non encore couvertes par une couverture complémentaire incapacité, invalidité ou décès conforme au socle minimal seraient tenues d’engager une négociation sur ce thème.

Cotisation minimale, obligation pour l’employeur de financer la moitié de la couverture

L’employeur devrait cotiser au moins à hauteur de 1,50 % sur la tranche 1 de la rémunération (dans la limite du plafond de la sécurité sociale) pour couvrir les risques de la couverture minimale (décès, invalidité, incapacité).

L’employeur aurait l’obligation d’assurer au minimum 50 % du financement de la couverture collective à adhésion obligatoire des risques de décès, d’incapacité et d’invalidité.

Des dispenses d’adhésion au bénéfice de certains salariés seraient prévues, mais à préciser par décret.

Du nouveau sur la portabilité des droits

Le dispositif légal de portabilité des couvertures de prévoyance complémentaire permet, sous certaines conditions, aux salariés quittant l’entreprise et ouvrant droit à l’assurance chômage, de bénéficier du maintien de la couverture collective de l’entreprise pendant une durée maximale pouvant aller jusqu’à 12 mois selon la durée du dernier contrat de travail (c. séc. soc. art. L. 911-8).

Toutefois, la jurisprudence considère que lorsqu’une entreprise résilie son contrat d’assurance, après le prononcé de la liquidation judiciaire, l’organisme assureur n’est pas tenu de prendre en charge les garanties d’anciens salariés licenciés (cass. civ., 2° ch., 15 février 2024, n° 22-16132 FB).

Pour faire obstacle à cette décision, la proposition de loi prévoit que l’organisme assureur doit assurer le maintien des couvertures complémentaires santé et prévoyance pour les salariés licenciés même en cas de résiliation du contrat entre l’assureur et l’entreprise (proposition de loi, art. 4).

Information sur la prévoyance par les régimes complémentaires

Pour améliorer l’information des salariés, la proposition de loi prévoit que toute personne aurait le droit d’obtenir un relevé́ de sa situation individuelle au regard de l’ensemble de la couverture incapacité́, invalidité́, décès (proposition de loi, art. 4).

Par ailleurs, à partir d’un certain âge, chaque personne recevrait périodiquement, de la part de chaque régime dont elle relève, une estimation indicative globale du montant des prestations d’assurance auxquelles elle ou ses proches pourraient avoir droit en cas d’incapacité́, d’invalidité́ ou de décès.

Les modalités de ces informations seraient précisées par décret.

Proposition de loi n° 2663 visant à instaurer une prévoyance collective obligatoire pour tous les salariés https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/textes/l16b2663_proposition-loi#